CheikhAnta Diop, Volney et le Sphinx contribution de Cheikh Anta Diop à l'historiographie mondiale [Les civilisations du royaume de Kongo : des origines au XVIIIe siècle : étude de morphologie historique] : [thèse soutenue sur un ensemble de travaux] Conceptions of history in the works of Cheikh Anta Diop and Theophile Obenga: Le
Une malencontreuse erreur de saisie nous a fait écrire dans le titre du présent article dans notre précédente parution N°139 du Vendredi 12 octobre 2018 Parenté linguistique générique» au lieu de Parenté linguistique génétique». Les lecteurs voudront bien nous en excuser. La Rédaction PARENTE LINGUISTIQUE GENETIQUE ET UNITE AFRICAINE La question peut se poser à présent que faire de la parenté linguistique génétique ? Ici, on s’intéresse, plutôt, aux enseignements politiques qu’on peut tirer du “négro-africain” en tant que groupe linguistique. Ces enseignements sont développés, bien souvent, dans les travaux des Professeurs Cheikh Anta et OBENGA. Le sentiment, la preuve et l’arme de l’unité linguistique de l’Afrique et de la parenté linguistique génétique aident à combattre le régionalisme et le micronalisme, donnent la dimension diachronique indispensable à toute renaissance culturelle et linguistique et constituent un argument scientifique irréfragable. Un argument scientifique irréfragable Ferdinand de SAUSSURE cité par OBENGA 1978 65 et NGOM 1993 30 disait au sujet des Etrusques et des Latins “Si l’on cherche ce qu’ils ont de commun, dans l’espoir de les ramener à une même origine, on peut faire appel à tout ce que ces peuples ont laissé monuments, rites religieux, institutions politiques etc. Mais on n’arrivera jamais à la certitude que donne immédiatement la langue”. La langue et la linguistique sont, donc, des sources auxiliaires de la recherche. Mais, en même temps, elles constituent de manière intrinsèque un argument irremplaçable et suffisant dans tout rapprochement entre peuples et cultures. La dimension diachronique de la renaissance culturelle, scientifique et linguistique de l’Afrique noire Dans le renforcement de la personnalité culturelle africaine, et partant de l’identité culturelle des africains, Cheikh Anta estimait “qu’il serait difficile de dire, entre le facteur historique et le facteur linguistique, lequel des deux est le plus important”1981 275. A l’appui de cela, il cite Montesquieu “Tant qu’un Peuple vaincu n’a pas perdu sa langue, il peut garder l’espoir…” Soulignant, ainsi, que pour lui, la “langue est l’unique dénominateur commun, le trait d’identité culturelle par excellence”. 1981 . La retombée principale de l’introduction de la dimension diachronique dans les recherches scientifiques et techniques africaines, voire africanistes, par le canal de l’établissement de la parenté linguistique génétique est “le déverrouillage de la pensée scientifique” elle-même DIOP, 1975 154-223. En effet, parlant du Colloque international du Caire, le professeur DIOP a écrit “il a permis d’introduire la dimension historique dans les études linguistiques africaines ainsi que le confirme notre…ouvrage intitulé Parenté génétique de l’égyptien pharaonique et les langues africaines. Maintenant seulement un véritable corps de sciences humaines africaines peut naître et se développer sur sa propre base historique qu’il s’agisse de l’histoire de la linguistique, de divers arts, de la pensée philosophique, religieuse etc. Maintenant seulement, les études diachroniques sont possibles en linguistique africaine” 1996 25. Dans le cas précis de la linguistique appliquée, et plus particulièrement de la politique linguistique, en direction de l’unité africaine, la Parenté linguistique génétique permet a “la constitution et l’enseignement des” Antiquités classiques africaines ” à base d’égyptien pharaonique ” DIOP, 1990 39. b L’établissement des lois de passage d’une langue africaine à une autre DIOP, 1960 17. c L’enrichissement d’une langue à partir des racines égyptiennes ou d’une toute autre langue africaine DIOP, 1970 418. d L’assimilation linguistique d’un africain par le biais des langues internationales africaines de culture quelconque, sans l’aliénation culturelle provoquée par des langues d’autres familles linguistiques DIOP, 1960 25. La lutte contre le régionalisme et le micronalisme Cheikh Anta estimait que l’une des solutions, dont, dispose l’Afrique pour lutter contre “les barrières ethniques” est la démonstration et la vulgarisation de la parenté culturelle et linguistique existant entre les peuples africains. Il écrivait, en effet, “En démontrant d’une façon indiscutable la parenté des Sévères, des walafs, des saras peuples des “négresses à plateau”, des sarakolés, des Toucouleurs, des Peuls, des laobés, je rends, désormais, ridicule tout préjugé ethnique entre les ressortissants conscients de ces différents groupements. Ce principe doit être étendu à toute l’Afrique par nos frères des autres régions” DIOP, 1990 52. Cette idée avait été formulée et systématisée en 1954. En effet, parlant de la sélection des langues véhiculaires africaines DIOP, 1960 20-29, cheikh Anta a soutenu que “Une telle tentative peut se heurter à un écueil psychologique la susceptibilité régionale des minorités bilingues ou non… cette susceptibilité est renforcé par l’idée que la minorité en question est étrangère ethniquement par rapport à la masse au sein de laquelle elle se trouve”. Alors “une étude ethnologique et linguistique appropriée, révélant une parenté insoupçonnée entre les groupements en présence, revêt une importance politique et sociale en ce sens qu’elle contribue à aplanir les difficultés qui s’opposent à la réalisation de l’unité linguistique” 1954 258. La conséquence logique de cela pour un ” africain conscient ” c’est qu’il ” doit se dégager de tout préjugé ethnique et acquérir une nouvelle forme de fierté…la fierté d’être africain, tant il est vrai que ces cloisons ethniques n’existent que par notre ignorance ” DIOP, 1954 321. Prévenant l’accusation d’exagération du rôle de la parenté historique, culturelle et linguistique dans la réalisation d l’unité africaine, Cheikh Anta affirma ne pas exagérer ce rôle et soutint, plutôt, ” qu’on ne doit pas négliger son importance “ et qu’il “n’existe pas de clé passe-partout, ni de pierre philosophale ; le secret du succès réside dans l’usage judicieux et coordonné de tous les facteurs sans négliger le moindre” DIOP, 1954 321. EN GUISSE DE CONCLUSION Au total, la parenté linguistique génétique entre l’égyptien ancien et les langues africaines modernes est établie, conquise et acquise. Qu’en faire maintenant ? En vue de la promotion des langues nationales en Afrique, des actions sont à entreprendre sérieusement à court, moyen et long termes selon les domaines d’application de la linguistique. En linguistique appliquée et en politique linguistique, il faudra – Régler les problèmes de segmentation, d’harmonisation des orthographes et des terminologies ; – Choisir les langues transfrontalières véhiculaires et les élever au rang de langues sous régionales et régionales sur tous les plans. – Evaluer et harmoniser les politiques linguistiques et en constituer des banques de données ; – Lancer de véritables campagnes de masse d’alphabétisation en langues nationales à l’échelle sous régionale, etc. En linguistique synchronique, il faudra développer les savoirs endogènes en matière de systématique de nos langues. Les très nombreuses lacunes des descriptions africanistes ne constitueront plus alors des obstacles à la promotion de ces langues. Il faudra en faire de même pour la dialectologie et la phonologie. En matière de linguistique historique comparative, il faudra encourager la recherche en vue d’évaluer les atlas linguistiques existants, en élaborer là où il n’en existe pas, et dresser des cartes linguistiques plus pertinentes, plus précises et plus opératoires. La poursuite des études comparatives ne doit plus être considéré comme luxueuse. Car celles-ci contribuent à créer, consolider et élargir la conscience de l’unité linguistique, l’autre fondement indispensable de nos politiques d’intégration. L’interrogation prospective du négro-africain OBENGA, 1973, ou du Paléoafricain comme dit Cheik Anta 1977 constituera, donc, l’un des leviers historiques de l’unité africaine. NOTES BARRY, H. “Contribution à l’étude de l’apport linguistique du professeur Cheikh Anta a Première partie in le Malien Magazine n°83 du 4 février 1999, b Deuxième partie in le Malien Magazine n°84 du 11 février 1999, c Troisième partie in le Malien Magazine n°85 du 18 février 1999, d Quatrième partie in le Malien Magazine n°86 du 25 février 1999, On lira avec grand profit les publications suivantes – UNESCO le peuplement de l’Egypte ancienne et le déchiffrement de l’écriture météorique-Actes du Colloque du Caire du 28 janvier au 3 février 1974-UNESCO, 1978, 187p. – BARRY. H “ Il y a vingt ans le Colloque du Caire… “ les cahiers du CAEC n°4, mai 1994, – Anonyme “les vingt ans du Colloque du Caire 1974-1994” in Ankh, revue d’égyptologie et des civilisations africaines, n°3 juin 1994, – OBENGA Th Cheikh Anta DIOP, Volney et le Sphinx Contribution de Cheikh Anta DIOP, à l’histographie mondiale, paris présence Africaine/Khepera, 1996, DIOP, Ch A Nations nègre et culture-Paris, présence Africaine, 1954,390p. cet ouvrage a été depuis réédité en 1964 et en 1979. Le professeur Jean DEVISSE était un des principaux contradicteurs du professeur DIOP voir l’article de Philippe DECRAENE dans le Monde du 4 Mars 1965, et la réponse de Cheick Anta, 1967 277-278. Depuis le professeur DEVISSE a eu le temps d’être rapporteur général du Colloque du Caire. Il a, ains,i conclu son rapport à la page 100 “La très minutieuse préparation des communications des professeurs Cheick Anta DIOP et OBENGA n’a pas eu, malgré les précessions contenues dans le document de travail préparoire envoyé par l’UNESCO, une contrepartie toujours égale. Il s’en suivi un réel déséquilibre dans les discutions”. Il a, aussi, tenu ces propos très touchants le 12 janvier 1986 moins d’un mois avant la mort de Cheikh Anta en la présence de DIOP lui-même “…il y a des chercheurs de bonne foi, et eux-là ne se rallient pas forcément d’un seul coup, ce n’est pas une reddition. Il ne s’agit pas d’une guerre ou d’une capitulation, ce qui serait de vous et de nous. Il ne s’agit pas de cela et je remercie beaucoup le professeur Cheikh Anta DIOP de m’avoir si clairement montré l’autre voie” ESSOMBA, 1986 p88. BIBLIOGRAPHIE DES TRAVAUX LINGUISTIQUES DE CHEIKH ANTA DIOP Nations nègres et culture. 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Y-a-t-il une unité culturelle de l’Afrique noire. Conférence clôturant les journées africaines de Rennes, séminaire organisé par l’association des étudiants africains et l’AGER sur le thème les langues vernaculaires en Afrique noire et structures sociales de l’Afrique noire en liaison avec le problème des pays sous-développés. Comment recréer à partir d’une langue, l’unité linguistique en Afrique noire* Conférence organisée par le Centre régional d’information de Diourbel Sénégal, Samedi, 16 Avril 1960 voir le Bulletin du Centre d’information de Diourbel n°6, avril 1960. Lamminu réew mi ak gestu* langues nationales et recherche scientifique, Samedi 28 Avril 1984, séminaire culturel de l’Ecole Normale Germaine Legoff, Thiès Sénégal – voir le chercheur, revue scientifique de l’association des chercheurs sénégalais, hommage à Cheikh Anta DIOP, Dakar n°1, 1990, pp. 13-48. L’importance de l’ancienne Egypte pour les civilisations africaines, Paris, Centre Georges Pompidou, conférence-débat organisée dans le cadre des “journées des cultures africaines 2”, par l’association Kaléidoscope et le service des affaires internationales du Ministre de la culture, 7 Juin 1985 in Nomade, revue culturelle n° spécial 1-2 “la Bombe” pp. 44-63. CONFERENCES DE PRESSE Conférence de presse, le 10 Août 1981, Chambre de Commerce de Dakar. Conférence de presse, le 15 Mars 1984, le relais avenue Cheikh Anta DIOP. INTERVIEWS “Les intellectuels doivent étudier le passé non pour s’y complaire mais pur y puiser des leçons”, in la vie africaine, n°6 Mars-Avril 1960 pp. 10-11. 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On connaît plus Cheikh Anta Diop l’historien, l’anthropologue, l’égyptologue, l’homme politique sénégalais et le panafricaniste dont le combat a, toute sa vie durant, consisté à restaurer l’histoire africaine. L’homme s’est pourtant illustré dans un tout autre domaine souvent moins connu ou passé sous silence celui de la traduction et c’est à ce rôle de traducteur, de passeur » que nous nous intéresserons particulièrement. Mais pour mieux comprendre cet intérêt manifeste que Cheikh Anta Diop a accordé à la traduction à travers son parcours intellectuel, il est nécessaire de revenir, de façon brève, sur la trajectoire de ce militant, mais également sur le contexte historique et politique dans lequel il a effectué ses traductions afin de mieux saisir leur portée. En effet, Cheikh Anta Diop est l’un des rares intellectuels africains de sa génération à avoir pris le contre-pied de l’idéologie colonialiste et raciste de son époque. Face à l’arrogance occidentale qui tient à tout prix à nier à l’Afrique son histoire et son apport à la civilisation, il a, très jeune, fait preuve d’un engagement et d’une volonté à s’opposer à l’entreprise colonialiste. Après de 281 Jean-Marc MOURA, op., cit., 1999, p. 42. brillantes études, à Dakar et à Saint-Louis, sanctionnées de deux baccalauréats en mathématiques et en philosophie, il débarque à l’âge de vingt-trois ans, en 1946, en France où il poursuit ses études supérieures. Sous la direction du philosophe Gaston Bachelard et du scientifique Frédéric Joliot-Curie, Cheikh Anta est resté constant dans sa quête du savoir qui constitue pour lui la meilleure façon de lutter contre la colonisation et l’impérialisme. Une quête qui lui mène au laboratoire du Collège de France où il commence à s’intéresser tout particulièrement à la physique nucléaire. Un parcours, sans aucun doute, brillant mais qui n’est pas sans obstacles pour lui notamment lorsqu’il commence à développer sa théorie tendant à remettre en cause les préjugés et l’idéologie occidentale qui n’ont pour but que de falsifier l’histoire de la race noire. Le rétablissement de cette histoire, Cheikh Anta Diop en a fait un sacerdoce et pour lui, l’africanité de l’Egypte ancienne, qu’il appelle l’Egypte nègre », est une réalité de la même façon que les origines africaines de l’humanité et de la civilisation sont irréfutables. Des positions très audacieuses, car prises dans un contexte de colonisation où l’infériorité de la race noire faisait presque l’unanimité dans l’Occident colonialiste, mais aussi dans une période où l’égyptologie était encore l’apanage d’une poignée d’intellectuels européens. Pour étayer sa thèse, Cheikh Anta Diop282 s’est livré à un argumentaire tirant ses sources des témoignages d’auteurs du domaine des sciences humaines et sociales, historiens et philosophes tels qu’Hérodote, Volney ou encore de la Bible. Il n’a pas non plus manqué d’arguments ethnologiques mais aussi et surtout linguistiques qu’il a largement développés. Pour Cheikh Anta Diop, le lien de parenté entre l’égyptien et les langues nègres ne saurait faire l’objet d’aucun doute, c’est une réalité irréfutable au vu des similitudes qu’il juge trop remarquables pour relever du simple fait du hasard. Pour justifier cette thèse qu’il a tant défendue, il se livre à une étude comparative des grammaires égyptienne et wolof et de leurs vocabulaires respectifs. Dans le chapitre IV de son ouvrage Nations nègres et Culture, intitulé Arguments pour une origine nègre de la race et de la civilisation égyptiennes », l’auteur consacre plus d’une cinquantaine de pages à la démonstration des similitudes entre les deux langues283. Une étude touchant quasiment tous les aspects de la langue, de la conjugaison aux 282 Cheikh Anta DIOP, Nations nègres et Culture. De l'antiquité nègre égyptienne aux problèmes culturels de l'Afrique noire d'aujourd'hui, Présence Africaine, Paris, 1954. 283 Ibid., pp. 231-287. caractères des substantifs en passant par la formation des pronoms, l’expression du temps etc. A travers cette étude comparative, Cheikh Anta Diop s’attache à démontrer la parenté entre langues nègres, en l’occurrence le wolof, et la langue égyptienne en mettant particulièrement l’accent sur leurs nombreuses caractéristiques communes cf. voir annexes. Mais, ses positions ont aussitôt suscité réserves et critiques. D’abord en France où, faute d’un jury disposé à admettre une supposée africanité de l’Egypte antique, il a du mal à soutenir sa thèse de doctorat à la Sorbonne en 1954. Les hostilités des intellectuels européens à son égard n’ont toutefois fait que renforcer ses convictions d’autant plus que cette thèse de doctorat pour laquelle il n’arrive pas à trouver un jury sera publiée la même année sous le titre Nation nègres et Culture. De l'antiquité nègre égyptienne aux problèmes culturels de l'Afrique noire d'aujourd'hui ». Cet ouvrage, bien que devenu incontournable dans l’œuvre intellectuelle négro-africaine, n’a pas pour autant convaincu une bonne partie de l’intelligentsia africaine, voire sénégalaise, si ce n’est l’adhésion d’Aimé Césaire qui, dans son célèbre ouvrage Discours sur le colonialisme, n’a pas hésité à louer l’audace de l’auteur affirmant que c’est le livre le plus audacieux qu’un nègre ait jamais écrit284». Cette mise à l’écart du milieu intellectuel l’a quand même poussé à se montrer plus consensuel en abordant un sujet beaucoup moins conflictuel intitulé Etude comparative des systèmes politiques et sociaux de l’Europe et de l’Afrique, de l’antiquité à la formation des Etats modernes285 ». Il obtient finalement son titre de Docteur le 9 janvier 1960 à la Sorbonne après sept heures de soutenance avant de retourner au Sénégal où il sera nommé assistant à l’université de Dakar la même année. Ensuite, sur le plan sénégalais et africain, Cheikh Anta n’a pas tardé à faire face à un adversaire de taille en la personne de Léopold Sédar Senghor 1906-2001, deux intellectuels dont la cohabitation dans ce Sénégal nouvellement indépendant est marquée par une opposition idéologique à tous les points de vue. Cette opposition ne s’est pas limitée au terrain politique où Cheikh Anta Diop, fondateur en 1976 du parti Rassemblement National Démocratique RND, est resté l’un 284 Aimé CESAIRE, Discours sur le colonialisme, Présence Africaine, Paris, 1955. 285 des adversaires politiques les plus redoutables du président Léopold Sédar Senghor286 ». Leurs divergences intellectuelles semblent dater de bien avant l’indépendance, notamment sur les questions relatives aux idéaux panafricains. En effet, leurs désaccords peuvent se lire dans l’ouvrage Nations nègres et Culture publié en 1954, et dans lequel l’auteur Cheikh Anta Diop apporte une réponse ironique mais ferme à ce vers aussi célèbre que controversé de Léopold Sédar Senghor l’émotion est nègre et la raison hellène ». Il accuse d’ailleurs ce dernier de contribuer peu à peu à la création d’une littérature nègre de complémentarité, se voulant enfantine, puérile, bon enfant, passive, résignée, pleurnicharde287 ». Cette même idée de la responsabilité des écrivains africains à produire une littérature engagée qui continue de faire débat aujourd’hui apparaît déjà chez Cheikh Anta Diop qui, faisant allusion à cette phrase de Senghor, écrit […] Un tel climat d’aliénation a fini par agir profondément sur la conscience du Nègre, en particulier du Nègre instruit qui a eu l’occasion de prendre conscience de l’idée que le reste du monde se fait de lui et de son peuple. Il arrive très souvent que le Nègre intellectuel perde confiance en ses propres possibilités et en celles de sa race à tel point que, malgré la valeur des démonstrations exposées au cours de cette étude, il ne sera pas étonnant que certains d’entre nous, après en avoir pris connaissance, éprouvent encore du mal à admettre que nous ayons vraiment assumé le premier rôle de civilisateur du monde. Il est fréquent que des Nègres d’une haute intellectualité restent victimes de cette aliénation au point de chercher de bonne foi à codifier ces idées nazies d’une prétendue dualité du Nègre sensible et émotif, créateur d’art, et du Blanc fait surtout de rationalité. C’est ainsi que s’exprime de bonne foi un poète nègre africain dans un vers d’une admirable beauté L’émotion est nègre et la raison hellène »288. 286 Boubacar Boris DIOP, Le Sénégal entre Cheikh Anta Diop et Senghor », The University of Texas at Austin, 2005, p. 2. Article accessible en ligne Consulté le 17/05/16. 287 Cheikh Anta DIOP, op., cit., p. 55. 288 Ibid., pp. 54-55. Au-delà de son opposition idéologique avec le pouvoir du moment représenté par Senghor, Cheikh Anta s’est aussi illustré sur le plan panafricain dont il constitue encore aujourd’hui une figure incontournable pour la jeunesse africaine aspirant à l’unité du continent. Il a, dans le cadre de son combat idéologique, produit une œuvre intellectuelle abondante dans laquelle la question linguistique, plus particulièrement la traduction, occupe une place centrale. La traduction comme moyen de déconstruction de l’idéologie linguistique
Bleuégyptien. bleu égyptien, aussi connu sous le nom silicate de calcium et de cuivre (CaCuSi 4 O 10 ou CaOCuO (SiO 2) 4 (tétrasilicate de cuivre et de calcium)) ou cuprorivaite, est un pigment utilisé dans l'Egypte ancienne pendant des milliers d'années. Il est considéré comme le premier pigment synthétique. [1]Cheikh Anta Diop naît en 1923 dans un petit village du Sénégal, Caytou. L'Afrique est sous la domination coloniale européenne qui a pris le relai de la traite négrière atlantique commencée au 16ème siècle. La violence dont l'Afrique est l'objet, n'est pas de nature exclusivement militaire, politique et économique. Théoriciens Voltaire, Hume, Hegel, Gobineau, Lévy Bruhl, etc. et institutions d'Europe l'institut d'ethnologie de France créé en 1925 par L. Lévy Bruhl, par exemple, s'appliquent à légitimer au plan moral et philosophique l'infériorité intellectuelle décrétée du Nègre. La vision d'une Afrique anhistorique et atemporelle, dont les habitants, les Nègres, n'ont jamais été responsables, par définition, d'un seul fait de civilisation, s'impose désormais dans les écrits et s'ancre dans les consciences. L'Égypte est ainsi arbitrairement rattachée à l'Orient et au monde méditerranéen géographiquement, anthropologiquement, culturellement. C'est donc dans un contexte singulièrement hostile et obscurantiste que Cheikh Anta Diop est conduit à remettre en cause, par une investigation scientifique méthodique, les fondements mêmes de la culture occidentale relatifs à la genèse de l'humanité et de la civilisation. La renaissance de l'Afrique, qui implique la restauration de la conscience historique, lui apparaît comme une tâche incontournable à laquelle il consacrera sa vie. C’est ainsi qu’il s'attache, dès ses études secondaires à Dakar et St Louis du Sénégal, à se doter d'une formation pluridisciplinaire en sciences humaines et en sciences exactes, nourrie par des lectures extrêmement nombreuses et acquiert une remarquable maîtrise de la culture européenne, il n'en est pas moins profondément enraciné dans sa propre culture. Sa parfaite connaissance du wolof, sa langue maternelle, se révèlera être l'une des principales clés qui lui ouvrira les portes de la civilisation pharaonique. Par ailleurs, l'enseignement coranique le familiarise avec le monde arabo-musulman. A partir des connaissances accumulées et assimilées sur les cultures africaine, arabo-musulmane et européenne, Cheikh Anta Diop élabore des contributions majeures dans différents domaines. L'ensemble se présente comme une œuvre cohérente et puissante qui fait de Cheikh Anta Diop un savant et un humaniste. On se propose dans une première partie de dégager de manière concise quelques-uns des traits essentiels de son œuvre. En second lieu, on présente la poursuite de l'œuvre du savant dans le domaine de l'histoire et de l'égyptologie. L'œuvre de Cheikh Anta Diop La reconstitution scientifique du passé de l'Afrique et la restauration de la conscience historique Au moment où Cheikh Anta Diop entreprend ses premières recherches historiques années 40 l'Afrique noire ne constitue pas "un champ historique intelligible" pour reprendre une expression de l'historien britannique Arnold Toynbee. Il est symptômatique qu'encore au seuil des années 60, dans le numéro d'octobre 1959 du Courrier de l'UNESCO, l'historien anglo-saxon Basile Davidson introduise son propos sur la "Découverte de l'Afrique" par la question "Le Noir est-t-il un homme sans passé ?" Dans son récent ouvrage "Cheikh Anta Diop, Volney et le Sphinx", Théophile Obenga montre magistralement en quoi consiste l'originalité et la nouveauté de la problématique historique africaine ouverte et développée par Cheikh Anta Diop "En refusant le schéma hégélien de la lecture de l'histoire humaine, Cheikh Anta Diop s'est par conséquent attelé à élaborer, pour la première fois en Afrique noire une intelligibilité capable de rendre compte de l'évolution des peuples noirs africains, dans le temps et dans l'espace [...] Un ordre nouveau est né dans la compréhension du fait culturel et historique africain. Les différents peuples africains sont des peuples "historiques" avec leur État l'Égypte, la Nubie, Ghana, Mali, Zimbabwe, Kongo, Bénin, etc. leur esprit, leur art, leur science. Mieux, ces différents peuples historiques africains s'accomplissent en réalité comme des facteurs substantiels de l'unité culturelle africaine". [Théophile Obenga, Leçon inaugurale du colloque de Dakar de février-mars 1996 intitulé "L'œuvre de Cheikh Anta Diop - La Renaissance de l'Afrique au seuil du troisième millénaire", Actes du colloque de Dakar à paraître. Nations nègres et Culture – De l'Antiquité nègre égyptienne aux problèmes culturels de l'Afrique d'aujourd'hui– que publie en 1954 Cheikh Anta Diop aux Éditions Présence Africaine créées par Alioune Diop est le livre fondateur d'une écriture scientifique de l’histoire africaine. La reconstitution critique du passé de l'Afrique devient possible grâce à l'introduction du temps historique et de l'unité culturelle. La restauration de la conscience historique devient alors elle aussi possible. Les principales thématiques développées par Cheikh Anta Diop Les thématiques présentes dans l'œuvre de Cheikh Anta Diop peuvent être regroupées en six grandes catégories a. L'origine de l'homme et ses migrations. Parmi les questions traitées l'ancienneté de l'homme en Afrique, le processus de différentiation biologique de l’humanité, le processus de sémitisation, l’émergence des Berbères dans l’histoire, l'identification des grands courants migratoires et la formation des ethnies africaines. b. La parenté Égypte ancienne/Afrique noire. Elle est étudiée selon les aspects suivants le peuplement de la vallée du Nil, la genèse de la civilisation égypto-nubienne, la parenté linguistique, la parenté culturelle, les structures socio-politiques, etc. c. La recherche sur l'évolution des sociétés. Plusieurs développements importants sont consacrés à la genèse des formes anciennes d'organisation sociale rencontrées dans les aires géographiques méridionale Afrique et septentrionale Europe, à la naissance de l'État,.à la formation et l'organisation des États africains après le déclin de l'Égypte, à la caractérisation des structures politiques et sociales africaines et européennes avant la période coloniale ainsi qu'à leur évolution respective, aux modes de production, aux conditions socio-historiques et culturelles qui ont présidé à la Renaissance européenne. d. L'apport de l'Afrique à la civilisation. Cet apport est restitué dans de nombreux domaines la métallurgie, l'écriture, les sciences mathématiques, astronomie, médecine, ..., les arts et l'architecture, les lettres, la philosophie, les religions révélées judaïsme, christianisme, islam, etc. e. Le développement économique, technique, industriel, scientifique, institutionnel, culturel de l'Afrique. Toutes les questions majeures que pose l'édification d'une Afrique moderne sont abordées maîtrise des systèmes éducatif, civique et politique avec l'introduction et l'utilisation des langues nationales à tous les niveaux de la vie publique ; l'équipement énergétique du continent ; le développement de la recherche fondamentale ; la représentation des femmes dans les institutions politiques ; la sécurité ; la construction d'un État fédéral démocratique, etc. La création par Cheikh Anta Diop du laboratoire de datation par le radiocarbone qu'il dirige jusqu'à sa disparition est significative de toute l'importance accordée à "l'enracinement des sciences en Afrique". f. L'édification d'une civilisation planétaire. L'humanité doit rompre définitivement avec le racisme, les génocides et les différentes formes d’esclavage. La finalité est le triomphe de la civilisation sur la barbarie. Cheikh Anta Diop appelle de ses vœux l'avènement de l'ère qui verrait toutes les nations du monde se donner la main "pour bâtir la civilisation planétaire au lieu de sombrer dans la barbarie" Civilisation ou Barbarie, 1981. L’aboutissement d’un tel projet suppose - la dénonciation de la falsification moderne de l'histoire "La conscience de l'homme moderne ne peut progresser réellement que si elle est résolue à reconnaître explicitement les erreurs d'interprétations scientifiques, même dans le domaine très délicat de l'Histoire, à revenir sur les falsifications, à dénoncer les frustrations de patrimoines. Elle s'illusionne, en voulant asseoir ses constructions morales sur la plus monstrueuse falsification dont l'humanité ait jamais été coupable tout en demandant aux victimes d'oublier pour mieux aller de l'avant" Cheikh Anta Diop, Antériorité des civilisations nègres – mythe ou vérité historique ?, Paris, Présence Africaine, p. 12. - la réaffirmation de l'unité biologique de l'espèce humaine fondement d’une nouvelle éducation qui récuse toute inégalité et hiérachisation raciales "... Donc, le problème est de rééduquer notre perception de l'être humain, pour qu'elle se détache de l'apparence raciale et se polarise sur l'humain débarrassé de toutes coordonnées ethniques." Cheikh Anta Diop, "L'unité d'origine de l'espèce humaine", in Actes du colloque d'Athènes Racisme science et pseudo-science, Paris, UNESCO, coll. Actuel, 1982, pp. 137-141. L'ensemble de ces grandes problématiques définit de façon claire et cohérente un cadre, des axes et un programme de travail. L'apport méthodologique et les acquis du colloque du Caire Pour sortir l'Afrique du paradigme anhistorique et ethnographique dans lequel anthropologues et africanistes l'avaient confinée Cheikh Anta Diop adopte une méthodologie de recherche qui s'appuie sur des études diachroniques, le comparatisme critique, la pluridisciplinarité archéologie, linguistique, ethnonymie/toponymie, sociologie, sciences exactes, etc.. Grâce à une approche à la fois analytique et synthétique il lui a été possible de rendre aux faits historiques, sociologiques, linguistiques, culturels du continent africain, leur cohérence et leur intelligibilité. La nouvelle méthodologie en matière d'histoire africaine que préconise et met en œuvre Cheikh Anta Diop dans ses travaux est exposée dans son livre Antériorité des civilisations nègres – mythe ou vérité historique ?, op. cit., pp. 195-214 et largement commentée par le professeur Aboubacry Moussa Lam cf. bibliographie. S'agissant de l'Égypte ancienne alors étudiée dans son contexte négro-africain, Cheikh Anta Diop écrit "Partant de l'idée que l'Égypte ancienne fait partie de l'univers nègre, il fallait la vérifier dans tous Ies domaines possibles, racial ou anthropologique, linguistique, sociologique, philosophique, historique, etc. Si l'idée de départ est exacte, l'étude de chacun de ces différents domaines doit conduire à la sphère correspondante de l'univers nègre africain. L'ensemble de ces conclusions formera un faisceau de faits concordants qui éliminent le cas fortuit. C'est en cela que réside la preuve de notre hypothèse de départ. Une méthode différente n'aurait conduit qu'à une vérification partielle qui ne prouverait rien. Il fallait être exhaustif" Cheikh Anta Diop, Antériorité des civilisations nègres – mythe ou vérité historique ?, Paris, Présence Africaine, 1967, p. 275. En 1970, l'UNESCO sollicite Cheikh Anta Diop pour devenir membre du Comité scientifique international pour la rédaction d'une Histoire générale de l'Afrique. Son exigence d'objectivité le conduit à poser trois préalables à la rédaction des chapitres consacrés à l'histoire ancienne de l'Afrique. Les deux premiers consistent en la tenue d'un colloque international, organisé par l'UNESCO, réunissant des chercheurs de réputation mondiale, pour d'une part, traiter de l'origine des anciens Égyptiens, et d'autre part faire le point sur le déchiffrement de l'écriture méroïtique. En effet, une confrontation des travaux de spécialistes du monde entier lui paraissait indispensable pour faire avancer la science historique. Le troisième préalable concerne la réalisation d'une couverture aérienne de l'Afrique afin de restituer les voies anciennes de communication du continent. C'est ainsi que se tient au Caire du 28 janvier au 3 février 1974, organisé par l'UNESCO dans le cadre de la Rédaction de l'Histoire générale de l'Afrique, le colloque intitulé "Le peuplement de l'Égypte ancienne et le déchiffrement de l'écriture méroïtique". Ce colloque rassemble une vingtaine de spécialistes appartenant aux pays suivants Égypte, Soudan, Allemagne, USA, Suède, Canada, Finlande, Malte, France, Congo et Sénégal. La contribution très constructive des chercheurs africains tant au plan méthodologique qu'au niveau de la masse des faits apportés et instruits, a été reconnue par les participants et consigné dans le compte-rendu du colloque, notamment dans le domaine de la linguistique "un large accord s'est établi entre les participants". "Les éléments apportés par les professeurs DIOP et OBENGA ont été considérés comme très constructifs. … Plus largement, le professeur SAUNERON a souligné l'intérêt de la méthode proposée par le professeur OBENGA après le professeur DIOP. L'Égypte étant placée au point de convergence d'influences extérieures, il est normal que des emprunts aient été faits à des langues étrangères ; mais il s'agit de quelques centaines de racines sémitiques par rapport à plusieurs milliers de mots. L'égyptien ne peut être isolé de son contexte africain et le sémitique ne rend pas compte de sa naissance ; il est donc légitime de lui trouver des parents ou des cousins en Afrique."[cf. Histoire générale de l’Afrique, Paris, Afrique/Stock/Unesco, 1980, pp. 795-823]. S'agissant de la culture égyptienne "Le professeur VERCOUTTER a déclaré que, pour lui, l'Égypte était africaine dans son écriture, dans sa culture et dans sa manière de penser. Le professeur LECLANT a reconnu ce même caractère africain dans le tempérament et la manière de penser des Égyptiens." Le rapport, dans sa conclusion générale indique que "La très minutieuse préparation des communications des professeurs Cheikh Anta DIOP et OBENGA n'a pas eu, malgré les précisions contenues dans le document de travail préparatoire envoyé par l'UNESCO, une contrepartie toujours égale. Il s'en est suivi un véritable déséquilibre dans les discussions." Depuis 1974, les découvertes archéologiques, les études linguistiques, les études génétiques, l'examen de la culture matérielle, l'étude de la philosophie, etc. ne font que confirmer chaque jour davantage les grandes orientations de recherche recommandées par le Colloque du Caire. La postérité intellectuelle Dans le domaine de l'égyptologie, par exemple, une communauté d'égyptologues africains existe désormais. Elle s’est constituée selon les étapes ci-après. La période de la recherche solitaire 1946-1970 Jusqu'au début des années 1970, Cheikh Anta Diop poursuit, dans une totale solitude intellectuelle, ses recherches sur la parenté existant entre l'Égypte ancienne et le reste de l'Afrique noire engagées déjà depuis plus d'une vingtaine d'années. Un veto s'oppose implacablement à ce qu'il enseigne à l'Université de Dakar. Deux conséquences immédiates en découlent l'impossibilité d'orienter et de former les jeunes générations d'historiens et d'égyptologues africains, et celle de procéder au renouvellement complet des "Études africaines" tant sur le plan du contenu de l'enseignement intégration des antiquités égypto-nubiennes, etc. que sur celui des critères de compétence. Théophile Obenga rencontre Cheikh Anta Diop Au début des années 60, Théophile Obenga, découvre le livre de Cheikh Anta Diop Nations nègres et Culture. Théophile Obenga, est déjà formé à la philosophie et il maîtrise le grec ancien ainsi que le latin. Il s'oriente de manière décisive vers l'égyptologie et la linguistique. Il suit les enseignements de grands noms de la linguistique historique comme Henri Frei à l'Université de Genève et Émile Benveniste au Collège de France à Paris. Les premiers résultats des recherches de Théophile Obenga en histoire et en linguistique paraissent dans des articles dès 1969. C'est en 1973, qu'il publie aux Éditions Présence Africaine son premier grand livre, L'Afrique dans l'Antiquité - Égypte pharaonique/Afrique Noire. Le lecteur y trouvera entre autres des chapitres fondamentaux consacrés à la comparaison de la langue égyptienne ancienne et des langues négro-africaines contemporaines, ainsi qu'aux écritures anciennes du continent africain. Cheikh Anta Diop n'est désormais plus seul. Il le sait et il exprime l'espoir, dans sa préface au livre de Théophile Obenga, de voir se constituer à terme une équipe de chercheurs africains "Il est indispensable de créer une équipe de chercheurs africains où toutes les disciplines sont représentées. C'est de la sorte qu'on mettra le plus efficacement possible la pensée scientifique au service de l'Afrique.", avec la mise en garde préalable suivante "Puissent-ils comprendre qu'à la maîtrise des connaissances il faut ajouter l'efficacité de l'organisation pour se maintenir". Le colloque du Caire 1974 évoqué plus haut consolide la collaboration entre les deux hommes pour la réécriture de l'histoire de l'Afrique et partant de l'humanité, sur des bases strictement objectives. Les acquis du colloque du Caire provoquent des fissures dans le dispositif d'isolement dressé autour de Cheikh Anta Diop. La technicité du débat scientifique, dévoile jour après jour, l'incompétence et l'imposture africaniste qui se réfugie de manière malsaine, hier comme aujourd'hui encore, dans une pseudo critique à caractère psychanalytique ou dans le procès d'intention. Cheikh Anta Diop et Théophile Obenga se sont attachés, parallèlement à leurs recherches, à sensibiliser les Africains à l'histoire de l'Afrique avant la colonisation, aux enjeux vitaux qui lui sont associés, à faire naître des vocations, au moyen de conférences, de colloques, de longues interviews en Afrique, en Europe, dans les Caraïbes, aux États-Unis. Au fil des années des Africains se sont engagés dans la voie de l'égyptologie, tout en se heurtant, d’une part à l’hostilité du milieu universitaire, notamment francophone, où une telle orientation est "politiquement incorrecte" et d’autre part à la faiblesse des moyens matériels. Les continuateurs. L'École africaine d'égyptologie Une école africaine d'égyptologie s'est progressivement constituée. C'est le lieu de souligner, ici, toute l'importance que revêt la connaissance de l'intérieur de l'univers négro-africain, particulièrement à la langue, la culture matérielle, les conceptions philosophiques, religieuses et socio-politiques. On touche donc du doigt les critères mêmes que doit satisfaire un spécialiste véritable de l'Afrique ancienne. Les grandes orientations de travail de l'école africaine d'égyptologie recouvrent les thématiques développées par Cheikh Anta Diop, rappelées plus haut, ainsi que les recommandations du colloque d'Égyptologie du Caire. Les résultats les plus récents des recherches linguistiques, culturelles de manière générale sur la civilisation pharaonique alliés à ceux des recherches archéologiques illustrent la pertinence scientifique du cadre de travail négro-africain, son caractère éminemment fécond. La revue ANKH, Revue d'égyptologie et des civilisations africaines, a justement pour vocation de publier de tels acquis. ANKH signifie la "Vie" en langue égyptienne pharaonique. Créée en 1992, elle est dirigée par le professeur Théophile Obenga. Les collaborateurs de ANKH sont des chercheurs de divers pays, marque de son ouverture internationale. On y trouvera, outre les études consacrées à l’Antiquité égypto-nubienne linguistique, culture matérielle, philosophie, religion, archéologie,..., des synthèses sur l'Afrique en général, une section sciences exactes physique, mathématiques, informatique, ..., et une rubrique bibliographique. Parallèlement, toute une série d’ouvrages traduit la richesse de la recherche égyptologique africaine cf. bibliographie. Cette production intellectuelle de haut niveau s’enrichit chaque année de nouvelles études et constitue la base nécessaire d’un enseignement de qualité sur l'Afrique ancienne. En 1981, Cheikh Anta Diop est enfin nommé professeur d'histoire associé à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Dakar, c’est-à -dire vingt sept ans après la parution de Nations nègres et Culture, vingt et un ans après son Doctorat d'État. Il y enseignera en maîtrise, en DEA et dirigera des thèses jusqu'à sa disparition en 1986. La relève est assurée aujourd'hui par Aboubacry Moussa Lam et Babacar Sall, égyptologues à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Sollicités par nombre de clubs, de cercles d’études, d'associations comme les Générations Cheikh Anta Diop du Burkina-Faso, du Niger, du Mali, du Sénégal, les égyptologues africains assurent également une vulgarisation sur l’histoire ancienne de l’Afrique à travers cours, conférences, séminaires, expositions organisés en Afrique, aux États-Unis, dans les Caraïbes, en Europe. La jeunesse africaine du continent et de la diaspora est désormais édifiée sur la période de son histoire qui précède les quatre siècles de la traite négrière atlantique et d'occupation coloniale, jusqu'aux périodes les plus reculées. L'œuvre de Cheikh Anta Diop montre la nécessité pour l'Afrique d'un retour à l'Égypte ancienne dans tous les domaines celui des sciences, de l'art, de la littérature, du droit, ... La démarche historique, loin d'être conçue comme un repli sur soi ou une simple délectation du passé, permet à Cheikh Anta Diop de définir le cadre de réflexion approprié pour poser, en termes exacts, l'ensemble des problèmes culturels, éducatifs, politiques, économiques, scientifiques, techniques, industriels, etc., auxquels sont confrontés les Africains, aujourd'hui, et pour y apporter des solutions. C'est pourquoi toute son œuvre se présente comme le socle même d’une véritable renaissance de l'Afrique "[Et] les études africaines ne sortiront du cercle vicieux où elles se meuvent, pour retrouver tout leur sens et toute leur fécondité, qu'en s'orientant vers la vallée du Nil. Réciproquement, l'égyptologie ne sortira de sa sclérose séculaire, de l'hermétisme des textes, que du jour où elle aura le courage de faire exploser la vanne qui l'isole, doctrinalement, de la source vivifiante que constitue, pour elle, le monde nègre" Antériorité des civilisations nègres - mythe ou vérité historique ?, op. cit., p. 12.